Au nord, tout au nord de l’Europe, on trouve un pays insulaire : l’Islande. Destination prisée des vacanciers nature et des randonneurs chevronnés, l’île est aussi connue footballistiquement pour son claping lors de l’Euro 2016 et ses victoires légendaires contre l’Angleterre. Avec une population légèrement inférieure à 400 000 habitants, l’Islande se classe à la 175ème position mondiale, entre Malte et Vanuatu. Pourtant, les Strákarnir okkar se hissent à la 70ème position du classement FIFA. La ferveur des fans et la capacité à s’exporter efficacement en Scandinavie et dans le reste de l’Europe sont deux facteurs clés expliquant ce succès.
En revanche, le championnat national, lui, se positionne à une bien terne 36ème place au classement UEFA, derrière le « voisin » féroïen et le micro-état du Liechtenstein. Un climat difficile, un calendrier inversé et un manque d’investissement global freinent le développement de la Besta Deildin. Espoir dans la brume islandaise : la participation historique du club de Breiðablik à la phase de groupe de la Ligue Conférence la saison passée.
Sur les 12 équipes de première division, seules 3 ne sont pas basées dans la capitale Reykjavik : Íþróttabandalag Akranes (ÍA), Vestri Ísafjördur (Vestri) et Knattspyrnufélag Akureyrar (KA). C’est cette dernière équipe que j’ai le plaisir de suivre aujourd’hui. Club de la deuxième ville du pays (20 000 habitants), et champion islandais en 1989. En quelques chiffres, KA dispose de 25 joueurs dans son effectif dont 3 joueurs étrangers, une moyenne d’âge de 25,7 ans et une valeur globale de 1,93 millions d’euros (Transfermarkt). KA affronte Fram Reykjavík en quart de finale de la coupe d’Islande. Un match à ne pas manquer !
Situé à 100 kilomètres du cercle polaire arctique, le club d’Akureyri et son stade (KA Völlurinn) accueillent donc l’équipe de Fram. Une pelouse synthétique (climat oblige), une seule et unique tribune latérale, mais surtout une vue sur les montagnes font de ce stade une curiosité pas déplaisante pour les yeux !
Nous sommes le 13 juin 2024 et à 18H00, le coup d’envoi est donné. Sur le terrain, 22 joueurs et 6 nationalités représentées (Islande, Espagne, Angleterre, Brésil, USA et Portugal). Une opposition de style entre les visiteurs, plus techniques, tentant des ressorties de balle propres et créatives et le club local, plus direct avec un jeu en transition efficace. C’est dès la sixième minute du match que le tournant arrive. Quoi de plus simple qu’un but pour KA, qui met les locaux dans les meilleures dispositions. Un avantage en cours, une qualification virtuelle et l’obligation pour Fram de revenir au score. KA prend ensuite le dessus mentalement grâce à un jeu collectif particulièrement bien léché et une confiance bien étonnante pour ceux qui restent sur 2 défaites de rang et pas moins de 8 buts encaissés. Malgré quelques occasions notables, Fram ne reviendra jamais dans le match et KA mettra fin à leurs espoirs par deux fois (78ème et 89ème) portant le score final à 3-0.
Si le niveau de jeu global demeure relativement moyen, certainement équivalent au troisième échelon français (National 1), on trouve pourtant de l’intérêt à voir un tel match. Une tribune remplie pour 550 spectateurs, quelques talents intéressants comme Kyle McLagan, le roc américain, bien malheureux en défense centrale de Fram, Tiago Fernandes, formé au Sporting Portugal et véritable métronome de la même équipe ou encore chez les victorieux du jour, le capitaine et international islandais Ásgeir Sigurgeirsson, son coéquipier, auteur d’un doublé opportuniste Bjarni Adalsteinsson ou encore un certain Rodri.
"Un Rodri peut en cacher un autre"
Quel genre de joueur peut choisir de venir jouer à quelques encablures du cercle polaire arctique ? Prenons l’exemple du milieu défensif espagnol de KA : Rodri. Formé au FC Barcelone, il y joue même un match de Segunda B en 2011/2012. Non retenu par le club catalan, il tente alors de rebondir dans les divisions amateures espagnoles jusqu’en 2014. Cette année-là, il rejoint le modeste club islandais de Sindri. Il n’y restera que quelques mois avant de rejoindre l’élite et le club de Grindavik et enfin 5 années plus tard Akureyri. On retrouve souvent ce profil d’anciens joueurs de clubs européens reconnus, n’ayant su percer dans leurs pays respectifs et qui ont tenté l’expérience islandaise. Être amateur chez soi ou professionnel en Besta deild, beaucoup ont choisi avec succès de rejoindre l’Islande, avec succès. Claping de fin pour un match à part.